Partir
ou
Rester à Polis

 
 
     

Communauté Hellénique
de Paris et des Environs

Tel : 01 47 04 67 89

 

Ελληνική Κοινότητα
Παρισιού και Περιχώρων

Τηλ : 00 331 47 04 67 89

 

 


La Communauté Hellénique de Paris et des environs

 

 

Conférence de Anna Theodoridès

Partir ou rester à Polis :

La survie des Grecs d’Istanbul au lendemain des violences
de la nuit du 6 au 7 septembre 1955

Visio-conférence,
en français et en deux volets, suivie d'un débat, de

Anna Theodoridès
Sociologue

     
 

 

 

 

 

Anna THEODORIDES
En ce dimanche 18 avril 2021, nous avions invité Anna Théodoridès à nous parler d’un de ses principaux sujets de recherche, qui intéresse, au premier chef, pour des raisons historiques, une large part de la Communauté hellénique de Paris et, pour tout dire, à peu près tous les Grecs.
Pourvue de deux masters et d’un diplôme d’interprétariat, notre invitée s’est attelée à la préparation d’un doctorat en sociologie, à l’École de Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) à Paris, sous la direction de Hamit Bozarslan, sous un titre évocateur :
Survivre en contexte minoritaire : une étude sociologique des résistances des Grecs d'Istanbul (Rûms polites) au lendemain des émeutes de la nuit du 6 au 7 septembre 1955, à Istanbul.
Un tel sujet portant à Istanbul (Πόλις) sur « la survie en contexte minoritaire » impliquait de longues enquêtes auprès des populations concernées à la suite d’un événement tragique, c’est-à-dire une approche comparative des constructions mémorielles des Rûms d’Istanbul, principale cible du pogrom de la nuit du 6 au 7 septembre 1955, ce qui a conduit notre chercheuse à résider successivement à Istanbul, à Athènes et à Thessalonique.
C’est ce travail qui a nourri la conférence qu’elle a présentée, en annonçant clairement la couleur :
Partir ou rester à Polis :
La survie des Grecs d’Istanbul au lendemain des violences de la nuit du 6 au 7 septembre 1955.

Ces sinistres événements de septembre que nous appelons communément Τα Σεπτεμβριανά, eux-mêmes alimentés par l’épineuse question de fond chypriote (le sort de l’île se jouant, au même moment, à Londres), furieux pillages spoliations et massacres auraient été déclenchés par l’attentat, jamais vraiment élucidé, de la maison natale de Mustapha Kemal à Salonique. Leur déchaînement est surtout une illustration supplémentaire d’une politique d’ingénierie démographique qui porte un nom : la purification ethnique, périodiquement mise en œuvre par la Turquie.

Au lendemain de ces émeutes et des catastrophes qui s’ensuivirent, la population rum de Constantinople dut affronter un dilemme pour le moins cornélien : rester ou partir. Ceux qui choisirent de rester durent adopter des stratégies et des comportements de survie en milieu particulièrement hostile. C’est en s’appuyant sur de minutieuses recherches ethnographiques que A. Th. nous montre comment, au lendemain de cette nuit tragique, les Grecs d’Istanbul se sont mobilisés, quels comportements ont-ils dû adopter pour préserver leur unité, leur identité, leur singularité, bref leur ancrage dans l’histoire cosmopolite d’Istanbul.

Pour ceux qui ont préféré partir, la chercheuse enquêtera aussi à Athènes et à Salonique, principaux points de chute de ces exilés semi volontaires. Mais ce volet fera l’objet d’une seconde conférence dans un très proche avenir.

Anna Théodoridès nous a exposé par le menu ses méthodes de travail et d’investigation, la façon de mener ses interviews avec les outils méthodologiques appropriés : ainsi la typologie des tranches d’âge interrogées (adultes ou nouvelles générations) mais aussi les groupes sociaux, tels que les Eduqués ou Lettrés, d’une part, et les Silencieux, de l’autre. Ses observations lui ont permis de mettre en lumière des « astuces » servant à mettre en place une forme de résistance, silencieuse et souterraine, qui ont élaboré des stratégies de survie, comme d’accommodation, suivant des logiques d’évitement et d’effacement, de contournement, d’anticipation du danger et d’auto-contrôle.

Le sujet suscita un vif intérêt et souleva un grand nombre de questions et de remarques. Nous attendons impatiemment le second volet de l’enquête de Anna Théodoridès et la remercions vivement d’avoir partagé avec nous les tenants et les aboutissants de ce travail passionnant.
M. R.

 


 

Τα Σεπτεμβριανά – Les événements de septembre 1955 ont marqué la mémoire collective des Grecs d’Istanbul : préparées de longue date par les services secrets turcs, ces actes de violences anti-minoritaires ont éclaté principalement à Istanbul, suite à des rumeurs de plastiquage de la maison natale d’Atatürk à Thessalonique.

La presse de propagande, Istanbul Ekspres a diffusé cette nouvelle à Istanbul alors que se jouait le sort de Chypre lors de la conférence tripartite à Londres.

 

C’est ainsi qu’à l’initiative des organismes de droite radicale et de l’association « Chypre est turque » soutenue par le pouvoir, plus de 100.000 personnes ont participé aux saccages et destructions de plus de 6000 bâtiments.

 

Ces émeutes ont ciblé principalement les membres de la communauté rûm.

Des églises orthodoxes ont été vandalisées avant de brûler, deux cimetières profanés, les commerces saccagés et pillés.

Plus d’une soixantaine de femmes ont été violées, quelques popes orthodoxes circoncis. Bilan : 11 morts.

Ce travail est le fruit de ma thèse de doctorat soutenue à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.

Je vous propose deux conférences :
La première s’appuie sur l’enquête menée à Istanbul. Elle se concentre sur les membres de la communauté qui résident toujours à Istanbul : ils mènent depuis 1955, une forme de résistance, silencieuse et souterraine en élaborant des stratégies de survie.

La seconde conférence vous sera proposée à une date à définir.
 

 

 

     
 

Le 30 mai 2021, Anna Théodoridès a bien voulu évoquer pour nous le second volet de son enquête portant sur le sort d’une partie des Grecs d’Istanbul (Polites) qui, eux, ont choisi de partir, discrètement, à la suite des violents événements de la nuit du 6 au 7 septembre 1955 –connus sous le nom de Τα Σεπτεμβριανά. Et qui ont cherché des moyens de survie dans un pays d’accueil, principalement en Grèce, tout comme leurs concitoyens l’avaient fait en restant à Polis.

Cette fois-ci, l’enquête a été menée par A. Th. en Grèce, essentiellement à Athènes et à Thessalonique. Les recherches ont été effectuées d’après des listes d’exilés « volontaires » qui, entre 1955 et 1963, sont majoritairement mariés et pères de famille ; il y a, néanmoins, des listes d’unités générationnelles différentes, avec des niveaux de vie différents (éducation, maîtrise de la langue) des jeunes instruits, des intrépides qui ont choisi d’affronter l’inconnu, des familles nanties, des « éduqués » ou alors des « silencieux », ceux qui rencontrent le plus de problèmes de travail, de santé et de scolarité pour leurs enfants et qui préfèrent résister dans l’invisibilité.

Leur destin et leur destination dépendent souvent des opportunités professionnelles qui se présentent dans le pays d’accueil, de leur nationalité (hellénique ou turque), des contacts dont ils disposent parmi leurs amis ou les membres de leur famille déjà installés en Grèce, de la mobilisation face aux expulsions collectives.

Quoi qu’on en pense, il leur a fallu faire face à une certaine stigmatisation, (giaour en Turquie, τουρκόσποροι en Grèce !) – même migrants actifs pour les premiers expulsés, ils étaient pour bon nombre d’entre eux des réfugiés… en somme des SANS-repères !

En conclusion, on peut dire que, pour préserver leur identité et se construire un espace (social), les Grecs de Constantinople (Polis) ont mené des combats voisins tant à Istanbul qu’à Athènes ou à Thessalonique.

Merci infiniment à Anna Théodoridès pour les deux conférences qu’elle a offertes à la Communauté hellénique de Paris et des environs.
Marie Roblin

https://youtu.be/HhmjbxrmkWg

 

 

 


 

 


 

 

                                                                                                                                                    

 

 

Page d'accueil