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Chers Amis,
J’ai le plaisir de vous présenter aujourd’hui Ulysse
Guttmann-Faure.
Malgré un prénom
prometteur, Ulysse n’a aucune origine grecque. Mais
ils’avère que son prénom est, en l’occurrence, prémonitoire.
Ce jeune homme d’à
peine 18 ans a réalisé, à l’âge de 17 ans, un reportage
photographique dans les camps de migrants à Chios et à
Lesbos. Ce sont ces photos que présente cette exposition.
C’est en cela qu’il trouve pleinement sa place ici, à la
Maison de la Grèce.
Vu le sujet, ce ne
sont pas des photos artistiques, dans le sillage de son
mentor,
j’emploie ce mot par allusion à un autre personnage de
l'Odyssée, d'ailleurs ; j’ai nommé le journaliste Fabien
Perrier, correspondant de presse à Athènes, de deux fois et
demie son aîné, il a 42 ans. Non, les seuls cadrages
qu’Ulysse a dû observer, c’était pour respecter le droit à
l’image, selon le souhait ou le statut des personnes, et
surtout quand il s’agit d’enfants ou plus globalement de
mineurs, ce qui lui imposait notamment d’éviter de les
rendre toujours identifiables et donc de s’abstenir assez
largement du portrait.
L’originalité du
projet consistait à saisir les conditions de vie ou plutôt
des situations de vie de ces jeunes migrants, à travers
l’œil d’un jeune homme, lui aussi, à même hauteur, dans
cette proximité distanciée qui signe d’un oxymore le
paradoxe de tout bon reportage. Les objets, les activités,
le cadre de vie, forment un ensemble qui permet d’approcher
le quotidien de cette population également composée de
mineurs, souvent de mineurs isolés, selon l’expression
reçue, c’est-à-dire non accompagnés.– Population parquée et
quelque peu oubliée aux confins de l’Europe, après moult
pérégrinations et péripéties, la plupart du temps terribles
et traumatisantes, dont rien ne laisse paraître aujourd’hui
toute l’ampleur mais que la situation de ces migrants
échoués sur les côtes lointaines d’îles voisines de la
Turquie fait, tout de même, deviner, avec pudeur, sous le
doux mensonge des ciels lumineux et des mers limpides. En
ranimant l’espoir, comme la mer, tout autour, « toujours
recommencée », selon le mot de Paul Valéry.
Certains d’entre
nous, dont je suis, qui venons de familles qui ont connu
l’exode d’Asie mineure, après 1922, sommes particulièrement
sensibles aux duretés de cet exil contemporain qui doit
tout, lui aussi, à des tragédies de masse.
Ulysse Guttmann-Faure
vient d’entamer des études de droit ; l’exposition que vous
voyez est parrainée par l’Association des Droits de l’Homme
de la Sorbonne, l’Université de Paris I Panthéon Sorbonne,
l’École Pratique des Hautes Études, le Bureau de presse de
l’Ambassade de Grèce et notre modeste Communauté hellénique.
Il nous revenait de faire une place ici à la Maison de la
Grèce à ces épreuves photographiques qui témoignent
d’épreuves humaines et qui donnent « des preuves » de
respect et de solidarité à des êtres fragiles que nous
devons, quant à nous, regarder dans les yeux pour mériter le
même nom qu’eux : celui d’homme.
Merci, cher public,
d’être là et merci, cher Ulysse, d’avoir fait ce long
voyage.
Marie Roblin |
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