De l'Asie Mineure
à la Turquie

 
 
     

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La Communauté Hellénique de Paris et des environs
 

 

 

 

De l'Asie Mineure à la Turquie

La Communauté Hellénique de Paris et des environs
a le plaisir de vous inviter
à la présentation du livre de
Michel Bruneau


Jeudi 22 mars 2018 à 19 heures

 Maison de la Grèce
9, rue Mesnil, 75116 Paris

M° Victor Hugo

 

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Minorités, homogénéisation ethno-nationale, diasporas


Successivement part des empires romain, byzantin, ottoman, le territoire de l'Asie Mineure et de la Thrace orientale a été d'abord hellénisé, puis turquisé. À l'issue de la Première Guerre mondiale, et avec le démantèlement de l'Empire ottoman, il devient le territoire national de la jeune République turque.

Le pouvoir nationaliste des Jeunes Turcs puis des Kémalistes, appliquant une politique d'« ingénierie démographique » visant à l'éradication des minorités chrétiennes – Arméniens, Grecs, Assyro-Chaldéens –, a imposé dans la première moitié du xxe siècle une homogénéisation ethno-nationale, au prix d'événements traumatiques – massacres, purifications ethniques, génocide.

Il s'est trouvé ensuite confronté au défi de l'assimilation de sa minorité musulmane kurde.

Ces événements violents ont provoqué la dispersion de ces populations minoritaires en diasporas, auxquelles s'ajoute désormais la communauté transnationale turque plus récente, projection éclatée de l'espace anatolien sur l'Europe et le monde. Un lien mémoriel fort continue de relier la plupart de ces populations diasporiques avec leurs « patries perdues ».

En s'intéressant aux interfaces maritimes et continentales du territoire turc, ainsi qu'aux diasporas et au transnationalisme des peuples d'Asie Mineure, l'auteur nous donne, par une approche géo-historique, des clés de compréhension de cet espace péninsulaire entre Europe et Asie, et des peuples qui l'ont habité.
Prix René Pierre Louis Bessières 2016 de la Société de Géographie

Michel BRUNEAU

 

     

 

Bonsoir à toutes et à tous, merci de votre présence.

Je remercie, bien entendu, Michel Bruneau d’être parmi nous, ce soir, et lui souhaite la bienvenue,  à l’occasion de son deuxième voire troisième passage, à la Maison de la Grèce ; il nous avait rendu visite, il y a quelques années de cela, pour nous parler d’un autre sujet, également important, Des Grecs pontiques : diaspora, identité, territoires.

Je dirai quelques mots pour vous le présenter, très brièvement, ainsi que son œuvre.

Michel Bruneau est un géographe et helléniste français, plus largement fin connaisseur du monde grec, mais également éminent spécialiste de l'Asie du Sud-est, des questions de diaspora et des espaces transnationaux, dans une perspective interdisciplinaire, histoire, sociologie-anthropologie, science politique, géographie, s'appuyant notamment sur l'exemple de la diaspora grecque. Directeur de recherches émérite au CNRS, Michel Bruneau est rattaché à l'UMR « Europe, européanité, européanisation » de l'université de Bordeaux.

Ses publications s’articulent autour de cinq axes de recherches et d’études :

L’Asie du Sud-est – en témoigne, d’ailleurs, le sujet de sa thèse de doctorat à l’université Paris IV : Recherches sur l'organisation de l'espace dans le Nord de la Thaïlande

L’histoire et l'épistémologie de la géographie

Les diasporas et le transnationalisme

L’espace eurasiatique et les États-nations

L’Asie Mineure et la Turquie

Et c’est précisément à cette dernière orientation de son travail qu’appartient l’essai de géohistoire De l’Asie Mineure à la Turquie : minorités, homogénéisation ethno-nationale, diasporas, dont il sera question, ce soir. Ouvrage pour lequel – soit dit en passant – l’auteur a reçu le Prix René Pierre Louis Bessières 2016 de la Société de Géographie de Paris, et qui est actuellement en cours de traduction en grec à Thessalonique et sera publié sans doute à la fin de l'année 2018 par l'éditeur Kyriakidis. Il doit aussi sortir en turc à Istanbul en février ou mars prochain. Il a également été traduit en arabe et sortira au Koweït en 2018 avec un tirage assez fort, distribué dans l'ensemble du monde arabe. Ce dernier point est à souligner, car cela permettra de faire connaître l'histoire des Grecs d'Asie Mineure à un assez large public arabe qui ne la connaît pas bien ou pas du tout.

Cet essai a pour objectif de comprendre pourquoi la péninsule d’Asie Mineure, longtemps associée à celle des Balkans, dans le cadre d’empires multiethniques (byzantin puis ottoman), a évolué dans une direction divergente, vers une tendance à une homogénéisation de plus en plus grande (un seul État-nation turc), alors que les Balkans ont, au contraire, évolué vers une fragmentation entre un nombre de plus en plus grand d’États-nations. Le phénomène est appréhendé dans la longue durée (de l’Antiquité à nos jours) et la durée courte (la Seconde Guerre Mondiale).

Un ouvrage ample de géographe, qui se fait aussi historien. Qui est explicite par son titre.  Dans son interrogation sur la transformation de la désignation « d’Asie Mineure » en un couple : « Anatolie » – « Turquie », l’auteur cherche à définir la trajectoire ayant mené à l’État-nation turc. Pour ce faire, il remonte le fil de l’histoire des populations et des civilisations (empires romain, byzantin, ottoman) qui se sont partagé un territoire, désormais, largement turquisé et islamisé.

La démonstration de Michel Bruneau – que je ne fais que survoler – s’organise en cinq grandes unités dont l’objet d’étude est l’Asie Mineure ou Anatolie – l’espace territorial donc, traversant les domaines chronologiques de l’histoire (Antiquité, Moyen Âge byzantin, période ottomane, histoire contemporaine) et les peuples mondes, dans la longue durée ; c’est également la tentative d’homogénéisation ethnique de ces espaces par le moyen de « l’ingénierie démographique» ; les interfaces de la Turquie avec les pays voisins et le monde ; les diasporas et le transnationalisme des pays d’Asie Mineure, les lieux de sa mémoire et la communauté transnationale turque. Elles interrogent, chacune, la mise en œuvre d’une ingénierie démographique  – terme d’euphémisme ou de pudique litote – qui, dès la fin du xixe siècle, et surtout à partir de 1915 par le gouvernement jeune-turc, mais aussi plus tard par le pouvoir kémaliste, inclut des événements traumatiques, massacres, purifications ethniques, spoliations matérielles, génocides visant à l’éradication des minorités chrétiennes – mais pas seulement ! – à leur disparition, expulsion ou répression, (des Arméniens, Grecs, Kurdes ou Assyro-Chaldéens).

 

De l’Asie Mineure à la Turquie est le fruit de dix ans de recherches et de réflexion, de voyages fréquents en Grèce et en Turquie durant vingt ans et d’enquêtes auprès des populations de réfugiés et de leurs descendants, sans oublier les références bibliographiques de sources multiples, appartenant à des langues et disciplines différentes, ainsi qu’à des domaines chronologiques de l’histoire très étendus.

Sa grande originalité réside dans le choix d'une approche globale pour analyser la disparition, l'expulsion ou la répression des diverses minorités du territoire. En conclusion, « De l’Asie mineure à la Turquie, minorités, homogénéisation ethno-nationale, diasporas » est un livre dense, complexe et passionnant permettant de mieux comprendre, à travers l’histoire et la géographie, les principaux enjeux d’une région clé entre l’Europe et le Moyen-Orient, aujourd’hui encore et toujours sous les feux de l’actualité en raison de la guerre contre Daesh, de la situation en Syrie, de la question kurde et de l’évolution politique propre de la Turquie.

À l’heure où certains discutent encore d’une adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, cet ouvrage permet d’éclairer le problème que pose aux négociateurs la négation par les autorités turques de ces périodes de l’Histoire.

Le monde actuel agité, troublé et mouvant d’incertitudes et de bouleversements, nous incite à lire cet ouvrage, précis, documenté et analytique qui, de plus, comporte à la fin un glossaire fort utile pour la compréhension de cette somme d’érudition ; c’est plus qu’un livre instructif pour nous Grecs et grecs de la diaspora, c’est un apport vital.

Merci

Marie Roblin

Photos : Vasiliki Papageorgopoulos

 


 

 

                                                                                                                                                    

 

 

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